Un chat européen, mâle castré, âgé de 9 ans, est présenté à la consultation de dermatologie pour un prurit facial, associé à des lésions mentonnières chroniques et récidivantes, modérément prurigineuses.
Emmanuel Bensignor, Dipl ECVD
Juillet 2023
Commémoratifs et anamnèse
Le chat vit en appartement, est alimenté avec des croquettes hypoallergéniques hydrolysées depuis plusieurs années à la suite d’épisodes de diarrhées, bien contrôlés depuis la mise en place du régime. Il est régulièrement traité contre les puces avec des applications mensuelles de Stronghold® plus. Il est en contact avec deux autres chats qui ne présentent pas de problème particulier. Les vaccinations sont à jour et aucun épisode viral n’est rapporté par la propriétaire.
Les lésions évoluent depuis plusieurs mois ; elles restent localisées au niveau facial avec un prurit variable. Des traitements corticoïdes systémiques améliorent la dermatose mais la propriétaire ne souhaite plus y recourir à cause d’une corticophobie marquée, liée entre autres à la présence chez son chat d’un souffle cardiaque asymptomatique. La thyroxinémie s’est avérée normale, tout comme le bilan biochimique.
Examen clinique
L’examen clinique montre des lésions situées sur le menton ; il s’agit d’une hypotrichose diffuse, associée à la présence de squames, et de manchons dans un contexte de séborrhée huileuse noirâtre (photos 1 et 2). Le prurit est évalué à 6/10 sur une échelle analogue visuelle conçue spécifiquement pour le chat – VAScat (1).
Photo 1 : aspect des lésions à l’inclusion (vue éloignée)
Photo 2 : vue rapprochée de la photo 1 : hypotrichose et enduit séborrhéique gras marqués
Les hypothèses diagnostiques envisagées regroupent une acné, une démodécie, une pyodermite bactérienne, une dermatite à Malassezia, une lésion du complexe granulome éosinophilique félin.
Les raclages ne montrent pas de parasites. Les cytologies par test au ruban adhésif coloré montrent la présence de Malassezia pachydermatis en quantité abondante, des coccis en quantité modérée considérée comme non pathologique, une absence de granulocytes.
Le diagnostic est celui d’une acné mentonnière, évoluant dans un possible contexte allergique.
Traitement
Après discussion avec la propriétaire, des biopsies ne sont pas acceptées et un traitement local est conseillé avec l’application quotidienne de PYOclean® Lingettes (Dermoscent® LDCA, Castres) pour leur effet purifiant, hydratant et régulateur.
Évolution
Après une semaine de traitement, une nette amélioration est rapportée avec diminution d’environ 50% des lésions séborrhéiques et des squames (photo 3). La VAScat est de 4/10. L’application des lingettes est décrite comme facile, le chat comme sa propriétaire appréciant particulièrement leur taille et leur odeur. Une semaine plus tard, une disparition presque complète des lésions est observée et les poils commencent à repousser (photo 4). Le prurit est quasiment absent et considéré comme très faible (VAScat de 2/10). Par la suite des applications hebdomadaires sont conseillées en prévention des rechutes.
Photo 3 : J7 bonne diminution lésionnelle
Photo 4 : J14 disparition des lésions, début de repousse pilaire
Photo 5 : J28
Conclusion
Ce cas illustre assez bien les caractéristiques de l’acné du chat. Il s’agit probablement d’un trouble de la kératinisation, rapidement compliqué de surinfections bactériennes et fongiques (2,3). Les lésions initiales regroupent des comédons et des manchons séborrhéiques qui donnent un aspect « sale » à la zone lésée. Le diagnostic est essentiellement clinique (2,3). Idéalement, le traitement doit débuter précocement pour limiter le recours aux antimicrobiens. L’utilisation de lingettes est particulièrement intéressante dans cette localisation. On choisira plutôt des produits ayant un effet antiseptique et régulateur, non irritants et avec un bon pouvoir hydratant.
Références
- Colombo S. et al. Development and validation of an owner assessed visual analog scale for feline pruritus severity scoring (VAScat) Vet Dermatol 2022 ; 33 : 407-413
- Bensignor E. et al. Guide pratique de dermatologie du chien et du chat. MedCom Paris, 2014 ; 352 p.
- Jazic E. et al. An evaluation of the clinical, cytological, infectious and histopathological features of feline acne. Vet Dermatol 2006 ; 17 : 134-40.