Auteur : Christian Collinot – Mars 2016
Clinique vétérinaire du ROC
117, avenue du maréchal LECLERC
86100 CHATELLERAULT
Les discussions qui ont eu lieu concernant ce “Cas clinique mystère” peuvent être retrouvées sur le forum (Cliquez sur l’onglet Forum en haut du site)
Encore Merci à Christian d’avoir animé ce cas sur le forum durant le mois de mars.:-)
Commémoratifs
Vénus est une chienne de race Golden retriever de 10 ans. Elle vit dans le Limousin, mi campagne/mi-ville. Nourrie avec une alimentation industrielle de bonne qualité, elle est vaccinée régulièrement et parfaitement déparasitée (APE, API). Elle a des problèmes de dysplasie coxo-fémorale et de laxité ligamentaire ayant nécessité l’intervention d’un orthopédiste (LCA) il y a peu de temps et a un complément de flexadin pour l’arthrose.Vénus n’est pas stérilisée.
Anamnèse
Depuis 7 mois a débuté une dermatose qui a été traitée successivement par:
- Clavaseptin (+ Eczemat par le pharmacien)
- Pyoderm pet phos
- Imaveral
- Fluviderm (1 mois) Pet phos megaderm imaveral (4 mois)
- Forthyron depuis 2 mois suite à bilan endocrinien: (commentaires du laboratoire joints)
- Cortisol (nmol/l) T1: 153 T2 (post ACTH) 364 valeurs normales pour le laboratoire
- T4 libre (pmol/l): T1: 17 T2: 20 (valeurs normales)
- TSH canine (μg/l): 0,5 ((valeur élevée pouvant correspondre aussi bien: à un dérèglement transitoire de l’axe hypothalamo-hypophysaire (en particulier en fin de dioestrus ou tumeur testiculaire), à la reprise de la sécrétion thyroïdienne après régression iatrogène (corticoïdes…), à un trouble primaire de la glande thyroïde (thyroïdite?), à une fuite protéique (affection hépatique ou rénale) ou à une hyperstradiolémie). A recontrôler dans 2 mois.))
CONSULTATION A
Examen clinique général
Bon en dehors des problèmes orthopédiques.
Examen dermatologique
Elle présente une dermatose alopéciante squamocroûteuse avec présence de manchons pilaires, de comédons et de papules et collerettes épidermiques principalement du tronc et sous le cou.
Les raclages ne montrent rien si ce n’est la confirmation de la présence de manchons pilaires en quantité importante.
Les calques montrent de très nombreux polynucléaires neutrophiles, des macrophages et des cellules histiocytaires géantes (cellules de Touton). La présence de coques est surtout extracellulaire.
Suite aux hypothèses cliniques suivantes: pyodermite sur fond d’ichthyose et/ou endocrinien, adénite sébacée granulomateuse infectée, toxidermie, des biopsies sont décidées.
6 biopsies sont effectuées
- B1: centrée sur papule
- B2: ‘’ sur zone alopécique
- B3: ‘’ sur collerette épidermique (+ B5 mais plus inflammatoire)
- B4: ‘’ sur manchons pilaires
- B6: ‘’ sur comédons
Conclusion de l’anatomopathologiste
Mise en évidence d’une dermatose alopéciante avec hyperplasie et hyperkératose folliculaire, déviation du cycle folliculaire des follicules pileux secondaires, subatrophie des annexes glandulaires, mucinose dermique et complications multifocales de pyodermite profonde principalement de type furonculose, sans détection d’éléments figurés pathogènes.
Son commentaire
Cet ensemble lésionnel incite à considérer la possibilité d’une endocrinopathie et notamment d’une hypothyroïdie qui serait ici compliquée de lésions de pyodermite principalement de furonculose. L’examen histologique ne permet pas d’évoquer une adénite sébacée granulomateuse idiopathique, hypothèse qui sera à priori exclue (les glandes sébacées sont visibles et ne sont pas systématiquement inflammatoires) ni une toxidermie, ni un trouble primitif de la cornéogénèse telle que l’ichthyose qui a été décrite dans la race à laquelle appartient l’animal.
En attendant les résultats des biopsies, un traitement antibiotique à base de céphalexine (600mg matin et soir pour une chienne de 35,5kg) associé à un shampooing antibactérien (Phlox) et une prévention APE par comprimés. Compte tenu du fait que Venus n’a pas actuellement de problème cardiaque et que le résultat des biopsiesest en faveur d’une endocrinopathie et notamment une hypothyroïdie, même si le résultat des dosages est “border line” et que l’hypothyroïdie apparaît le plus souvent plus précocement dans la vie de l’animal, nous avons proposé d’essayer de reprendre un traitement de supplémentation en T4 sur la base de 20 microg/kg/j en une ou deux prises pendant trois mois, sous couvert de surveillance cardiaque et de réévaluer en fonction du résultat clinique sur la peau à la fin de ce laps de temps.
Deux mois plus tard, il n’y a plus de signe de pyodermite et le poil a bien repoussé. Il reste gras sur le dos avec des plages un peu érythémateuses et squameuses moins fournies (alopéciques) de chaque côté du dos. Les antibiotiques avaient été arrêtés deux jours avant le contrôle et la supplémentation en T4 10 jours avant.
Des calques ne montrent rien de particulier, un dosage endocrinien est demandé chez le vétérinaire traitant.
Résultats
- Cortisol basal: 44, après stimulation ACTH: 351 (nmol/l) (valeurs normales)
- T4 libre: 15 – 17 (pmol/l) (valeurs à la limite de l’hypo et de l’euthyroïdisme; éventuellement à recontrôler ultérieurement si les troubles persistent)
- TSH: 0,1 (microg/l) (valeurs normales)
- (en italique: le commentaire du laboratoire)
Compte tenu du contexte, la supplémentation en T4 est reprise sur la même base avec apports d’acides gras insaturés (Actis omega: 6ml/J) et poursuite des shampooings et de la protection APE.
Deux mois plus tard, au contrôle, des papulocroûtes et des plaques squamo-croûteuses sont apparues autour du cou et des bras. Des calques sont identiques à ceux décrits plus haut. Un traitement antibiotique est repris, des shampooings avec du douxo pyo sont mis en place.
Après huit semaines, il n’ y a pas d’amélioration et l’apparition d’une alopécie. La supplémentation en T4 a été à nouveau arrêtée. Elle est reprise et rendez vous est pris pour une nouvelle consultation un mois plus tard.