Les tiques
BIOLOGIE
- RÔLES PATHOGENES - METHODES DE LUTTE
Les Ixodidés, ou tiques dures, sont les géants des acariens. Ils
ont une grande importance, à la fois économique, médicale et hygiénique.
Ils exercent une action pathogène directe, spoliatrice parfois toxique, et surtout
une action pathogène indirecte, par inoculation de divers agents pathogènes.
Cette importance est renforcée par le fait que les Ixodidés sont de répartition
cosmopolite.
Ils se sont adaptés
à tous les milieux, et à tout type d'hôtes, des reptiles aux
mammifères. Ils sont le fléau de l'élevage dans les pays chauds et y représentent
un véritable frein à l'essor économique. Le coût annuel lié à la lutte
contre les tiques et les maladies transmises par les tiques aux animaux est
estimé à 14 milliards de Dollars, supporté par les éleveurs et les agences
de santé. Ils sont également importants dans les pays industrialisés par leur
impact sur la santé des animaux de compagnie ou de sport (chiens, chevaux) et
les animaux de rente (bovins).
Ils transmettent
de nombreux agents pathogènes, virus, bactéries, protozoaires ou helminthes,
certains étant communs à l'Homme et aux animaux.
1-1- Caractères généraux des Ixodidés
Sous-Ordre d'acariens, Ixodoidea, regroupant les géants de l'ordre.
2 familles :les
tiques dures ou Ixodidae et les tiques molles ou Argasidae :
Les Ixodidae se caractérisent morphologiquement par un rostre
terminal et un écusson chitineux dorsal, et biologiquement par la succession
de trois stades parasitaires : larve, nymphe et adulte, chaque stade
ne faisant qu'un repas.
Les Argasidae
sont avant tout des tiques d'oiseaux, caractérisées morphologiquement
par un rostre infère et l'absence d'écusson dorsal, et biologiquement
par la succession de plusieurs stades larvaires et par la prise de plusieurs
repas sanguins au stade adulte. Ces tiques, principalement Argas reflexus
en France, dont nous ne parlerons plus, se trouvent généralement sous les toits,
là où les oiseaux ont des nids (pigeons en ville). Elles peuvent piquer les
mammifères (carnivores, Homme), en l'absence de leurs hôtes habituels.
Cosmopolite mais chaque espèce est inféodée à un biotope particulier:
écosystème / espèce: Aires à tiques.
Les populations sont
soumises à de fortes influences saisonnières.
Il existe des biotopes
correspondant aux stades libres (larves, nymphes et adultes, en attente
d'un hôte), qui peuvent varier pour une même espèce. Ainsi, dans le cas d'Ixodes
ricinus, Ixodes hexagonus ou Dermacentor reticulatus, les larves et nymphes
peuvent se trouver dans les terriers des rongeurs, tandis que les adultes se
localisent dans les herbes.
Il existe des tropismes
correspondant aux stades parasitaires. Les larves et nymphes peuvent
avoir un tropisme pour certains hôtes, comme les micromammifères (mulots, campagnols,
hérissons), tandis que les adultes vont rechercher des herbivores (bovins, cervidés),
cas d'Ixodes ricinus ou les Canidés, cas de Dermacentor reticulatus.
Importance économique
Liée à l'action pathogène directe et au rôle vecteur. Aux USA les pertes sont estimées à 500 M $/an, en Amérique du Sud à 875 M $/an, en Australie à 150 M $/an, en Afrique et Asie pertes estimées à 6-10 Milliards $/an, soit un coût mondial d'environ 14 Milliards de Dollars/an.
Importance médicale
Rôle pathogène direct: paralysies à tiques, syndrome fébrile (fièvres à
tiques)
Rôle pathogène
indirect: cowdriose, theilérioses, babésioses, spécifiquement exclusivement
transmises par les tiques.
Importance en Santé publique
Transmission de zoonoses ou de maladies communes à l'Homme et aux animaux telles que la Maladie de Lyme, les encéphalites à tiques, ou certaines rickettsioses.
Embranchement Arthropodes,
Sous-embranchement
Chélicérates,
Classe Arachnides,
Sous-Classe Hologastres,
Ordre Acariens,
Groupe des parasitiformes
Sous-Ordre Ixodida
= Ixodoidea ou Métastigmates
Famille Ixodidae
Larves : 0,5 - 1 mm, hexapodes (photos)
Nymphes : 3-5
mm à jeun, octopodes (photos)
Adultes : 5-10
mm à jeun, octopodes , dimorphisme sexuel accusé (photo
mâle) (photo femelle), jusqu'à
30 mm pour les femelles gorgées.
Extrémité antérieure (photo):
Les pièces buccales ou Gnathosoma.
Il est inséré sur le capitulum, constitué du rostre ou hypostome (pièce impaire,
dentée), des 2 chélicères et des 2 pédipalpes (photo).
Les pédipalpes
ont une fonction tactile, ils permettent à la tique de "choisir" le lieu de
la piqûre.
Les chélicères,
terminés par des crochets, sont envoyés dans le derme tels des harpons, puis
par rétraction musculaire, aident la tique à enfoncer son hypostome dans la
peau.
Les nombreuses épines
rétrogrades de l'hypostome aident à son maintien.
La longueur du rostre
permet de diviser les tiques en brévirostes et longirostres. La tique
enfonce toujours son rostre obliquement car elle est incapable de couder le
gnathosoma.
Corps ou Idiosoma (photos):
Face dorsale: un bouclier cuticulaire protecteur, ou scutum dorsal,
plus développé chez les mâles est observé (photos).
Les mâles ne peuvent se distendre alors que les femelles qui n'ont qu'un bouclier
dorsal réduit pourront augmenter considérablement leur volume.
Face ventrale:
présence de l'orifice génital entre les PII, de l'orifice anal
entre les PIV, des stigmates respiratoires ou péritrèmes, au nombre de
deux, juste derrière les PIV (photo).
Un sillon génital passant devant ou derrière l'orifice anal permet de
classer les tiques en deux groupes : tiques pro et métastriata.
Pattes (photo):
Elles sont constituées de 6 articles : Coxa, trochanter, femur, genou,
tibia, tarse (photos).
Le Tarse I porte l'organe
chimiosensoriel de Haller. Ce dernier, sensible aux vibrations, au taux
de CO2, intervient dans la détection de l'hôte
A noter que les tiques
possèdent d'autres organes sensoriels :
- Des aires poreuses sur la face dorsale des femelles, de part et d'autre
du capitulum, qui servent à la détection des mâles et à la communication entre
tiques
- Des yeux ou organes photosensibles, selon les genres, qui servent à
la détection des hôtes.
Appareil digestif, appareil génital, organes sensoriels.
Le tube digestif
est constitué d'un pharynx musculeux adapté à la succion des liquides, suivi
de caecums qui partent et reviennent dans un estomac. Ces caecums sont
adaptés au " traitement " d'un gros volume ingéré.
Des glandes salivaires
ramifiées débouchent au niveau du pharynx. Elles synthétisent divers composés
au cours du repas, d'abord un cément nécessaire à la fixation du rostre, puis
des enzymes protéolytiques et anticoagulantes. Elles dégénèrent en
fin de repas et prennent une fonction osmorégulatrice, rejetant une partie
du liquide ingéré, ce qui permet à la tique de maintenir son osmolarité (milieu
interne hypertonique par rapport au sang de l'hôte). C'est au cours de cette
phase de dégénérescence et d'excrétion que les agents pathogènes sont transmis
à l'hôte.
Il existe de nombreuses
connexions entre l'appareil digestif et l'appareil génital chez la femelle
(ovaire et utérus), ce qui explique le passage aisé d'agents pathogènes du tube
digestif à l'ovaire puis aux ovules, d'où la transmission verticale de ces agents
de la tique femelle à sa descendance.
Spoliation de 2 à 4 cm3 de sang par femelle, cette action pose problème lors d'un parasitisme continu dans certaines zones d'élevage (en particulier dans les zones équatoriales).
Action mécanique et enzymatique
Réaction inflammatoire autour du lac "nécrotico-hémorragique"
du repas. 3 zones sont distinguées (photos):
Zone 1 : foyer
nécrotique issu de la lyse cellulaire
Zone 2 : réponse
inflammatoire aiguë : congestion, œdème, dégranulation des basophiles
Zone 3 : Organisation
conjonctive périphérique, infiltration par lymphocytes, macrophages, fibroblastes
Complications des plaies: abcédation, relativement rare. En revanche, l'arrachage incomplet d'une tique, laissant une partie du rostre en place, entraîne bien souvent l'apparition d'un granulome inflammatoire qui peut persister plusieurs semaines.
Certaines tiques inoculent des glycoprotéines salivaires qui sont de véritables toxines. Elles ont pour la plupart comme cible des récepteurs nerveux et provoquent des paralysies ascendantes chez les hôtes piqués :paralysie ascendante à tiques (Afrique (Ixodes gibbosus), Australie (Ixodes holocyclus), Amérique (Dermacentor andresoni)).
Action antigénique et immuno-inflammatoire
Le granulome et l'inflammation qui accompagnent le repas sont dus à la présence de nombreux antigènes salivaires. La réponse immunitaire au cours d'une primoinfestation est un élément du repas puisque les cellules inflammatoires constituent une partie de l'ingéré : immunité cellulaire avec forte neutrophilie. La réponse immunitaire lors de réinfestations peut bloquer le repas et être protectrice: réactions d'hypersensibilité cutanée à basophiles.
Perturbations métaboliques générales
L'infestations par les tiques se traduit par diverses perturbations du métabolisme général des hôtes : anémie, syndrome fébrile (lié à la réponse immuno-inflammatoire et à la libération de diverses cytokines: Il-1, TNF et IFN), anorexie, diminution des productions (lait et viande), modifications qualitatives des viandes (insuffisance de protéines, excès d'eau et de graisse).
Les conditions nécessaires pour que les tiques soient des vecteurs sont la
transmission trans-stadiale et/ou transovarienne
Tique = vecteur biologique : arthropode hématophage qui assure une transmission
biologique et active d'un agent pathogène. L'infection du vecteur se
fait au cours repas sanguin. Les parasites sanguins, lymphatiques et
tissulaires (telmophagie) sont susceptibles d'être ingérés par les tiques.
Evolution de l'agent pathogène chez les tiques:
Multiplication: cas des virus et des bactéries - Transmission propagative
Modification et Multiplication - Transmission cyclo-propagative:
cas des babésies et des theiléries. Possibilité de transmission verticale
: à la descendance, par passage trans-ovarial des agents pathogènes.
Cas des babésies, faisant des tiques un réservoir pendant plusieurs générations.
Les tiques sont les hôtes définitifs des Babesia. Elles ingèrent
des gamétocytes lors du repas de sang. Ces derniers gagnent l'organisme de la
tique, se transforment en gamètes et la reproduction sexuée a lieu. Finalement,
les sporozoïtes qui en sont issus se multiplient activement et gagnent
tous les tissus de la tique, dont les glandes salivaires, où ils resteront de
stades en stades, et les ovaires chez la tique femelle, où ils passeront à la
génération suivante. Chez les Theileria, il n'y a pas de transmission
verticale.
Modification sans multiplication : transmission évolutive : cas des filaires
Le stade qui s'infecte n'est jamais celui qui
transmet. Le plus souvent, en matière de babésiose, c'est une tique femelle
qui s'infecte, puis les larves, nymphes et adultes qui en sont issus seront
les vecteurs.
Infection de l'hôte : au cours du repas, mais surtout en fin de repas,
lors de la phase d'excrétion avec dégénérescence des glandes salivaires.
Nature des agents transmis : (cliquez ici pour
voir le tableau correspondant)
Virus (> 99) : Encéphalites à tiques (Encéphalite centrale et verno-estivale
russe, fièvre de Powassan, maladie de la forêt de Kasyanur, fièvre hémorragique
d'Omsk et de Langat, fièvre à virus Wet-Nile. Encéphalomyélite ovine ou Louping-ill,
fièvre à tiques du Colorado...
Rickettsies:
ehrlichioses, coxiellose (fièvre Q), anaplasmose, cowdriose, fièvre pourprée
des montagnes rocheuses, fière boutonneuse méditerranéenne, typhus à tiques
du Queensland, typhus à tiques de sibérie...
Bactéries :
tularémie, peste, dermatophilose, borrélioses dont la maladie de Lyme...
Protozoaires:
Babesia : vecteur biologique obligatoire et exclusif, la tique est l'hôte
définitif
Theileria: vecteur biologique obligatoire et exclusif, la tique est l'hôte
définitif
Hepatozoon canis (transmission par ingestion de la tique).
Helminthes: filaires.
Les tiques sont des ectoparasites temporaires et non intermittents comme les moustiques. Il y a une alternance phase de vie libre/phase de vie parasitaire.
Il faut distinguer les Ixodidés à stades endophiles et exophiles:
- Tiques endophiles domestiques: Rhipicephalus sanguineus
(tous les stades se trouvent dans l'environnement direct des chiens: chenils,
sur le sol, les murs...) (photo).
- Tiques exophiles: Ixodes ricinus (photo),
Dermacentor reticulatus (photos):
les stades se voient dans les forêts, les bois, en lisière de champs, les terrains
vagues, certains jardins, dans les dunes sur le littoral...
Cette situation, endophile exophile, peut
varier pour une même espèce selon les stades, ce qui complique les cycles.
Pour Ixodes
ricinus, les larves et les nymphes (photos)
sont plutôt endophiles (terriers de rongeurs ou d'insectivores), tandis
que les adultes sont exophiles et chassent à l'affût sur les herbes (photos).
La situation
est identique pour Dermacentor reticulatus.
Variation des conditions climatiques
A côté du biotope, les conditions climatiques de température et d'humidité
vont jouer un grand rôle pour expliquer la présence de telle ou telle espèce:
- Tiques hygrophiles: elles ont besoin d'humidité, craignent les fortes
chaleurs et la dessiccation. C'est le cas d' Ixodes ricinus, et de Dermacentor
reticulatus (photo)
- Tiques xérophiles: elles vivent dans les zones chaudes, craignent le
gel. C'est le cas de Rhipicephalus sanguineus (photo).
Lorsque les conditions ne sont plus favorables à l'activité, les tiques entrent
en diapause: diapause hivernale, diapause en saison sèche. Les reprises
d'activité sont souvent liées aux saisons, pic printannier et automnal en France,
mais cela n'exclut pas des activités en plein hiver si le climat se radoucit,
même temporairement.
Les tiques peuvent être différenciées selon leur tropisme d'hôtes:
Les tiques euryxènes (ou polytropiques) sont peu spécifiques et vont
se nourrir sur de nombreux hôtes.
Les tiques sténoxènes (ou monotropiques) ont un tropisme d'hôte particulier
. Cette spécificité varie selon les stades:
Ixodes ricinus: Larves et nymphes (photos)
se trouvent plutôt sur les micromammifères, tandis que les adultes recherchent
les Ongulés. Les larves et nymphes pourront néanmoins piquer les oiseaux ou
la majorité des mammifères qu'ils rencontreront, ce qui explique la transmission
de la maladie de Lyme à l'Homme ou au chien.
Rhipicephalus
sanguineus (photo): tous les
stades se trouvent préférentiellement sur les canidés, mais les chats pourront
accessoirement être infestés.
Choix de l'emplacement: une fois sur l'hôte, les tiques se déplacent
à la recherche d'une zone propice au repas. Il s'agit généralement des zones
à peau fine : oreilles (photos),
dessous des membres, scrotum, mamelle... Pour trouver leur hôte, les tiques
se fient à la chaleur, l'odeur, la vue, puis le toucher. Elles ont pour cela
de nombreux organes chimiosensoriels dont l'organe de Haller sur
les tarses des premières paires de pattes.
Tous les stades se nourrissent: Larves, nymphes, et adultes (femelles, et mâles excepté pour le genre Ixodes).
Fixation de la tique: D'abord par les chélicères, puis par enfoncement de
l'hypostome denté.
Sécrétion de cément
10 à 30 minutes après fixation (céments primaire et secondaire, par les acini
salivaires de type II et III). Le cément est constitué de glycoprotéines qui
polymérisent au contact de l'air, formant une résine qui emprisonne et maintien
le rostre dans la plaie.
Repas: Il se
divise en deux phases. Il sera décrit pour les femelles. Il est plus court pour
les larves et les nymphes:
- Phase lente: de 7 jours pour Ixodes (passage Te 2 à 50 mg, surface
x 4)
- Phase rapide : 24 - 48 heures, alternance succion/excrétion, (poids
de 50 à 250 mg, surface x 15), absorbtion de 4 000 mg de sang. (adaptation corporelle
à la prise d'un gros volume liquidien : distension de l'exocuticule et osmorégulation).
La salive est de constitution complexe et variable dans le temps. Elle
renferme des substances vasoactives (prostaglandines), des substances anticoagulantes
(mucoprotéines), des agents cytolytiques (protéases, estérases), et des agents
chimiotactiques (histamine, sérotonine).
Fin du repas
: Osmorégulation par excrétion de liquide dans la plaie, involution des glandes
salivaires (acini de type I, synthèse d'un facteur Tick Salivary Gland Degeneration
Factor).
2-2- Reproduction (photo)
Intervention de nombreuses phéromones. Elles
permettent le rapprochement des sexes, l'accouplement des tiques et le début
du repas des femelles.
Phéromones sexuelles
(dérivés phénoliques volatiles 2,6 dichlorophénol)
Phéromones de regroupement
(substances hydrosolubles issues de la digestion du sang)
Phéromones d'aggrégation/attachement
Ponte (photos)
Ponte d'œufs au sol: agglutinés et protégés par une cire lipidique (synthétisé par l'organe de Géné) : 3 000 à 10 000 œufs /ponte. La ponte a toujours lieu au sol. Les femelles tombent de l'hôte, cherchent une anfractuosité pour se cacher et préparent en 48 à 72 heures leur ponte. Elles plient leur extrémité antérieure qui se fend dorsalement au niveau du capitulum. La ponte dure 1 à 2 jours et entraîne leur mort.
Les mues des tiques peuvent avoir lieu dans le milieu, ce qui correspond au schéma originel, mais aussi sur l'hôte pour certains genres ou espèces ayant évolué.
Cycle évolutif classique = triphasique, rencontrés dans tous les genres.
Il y a comme toujours un seul repas/stade, puis le stade gorgé tombe au sol
et mue. Le nouveau stade, à jeun, attend le passage d'un hôte pour continuer
le cycle. Toutes les tiques importantes rencontrées en France ont ce cycle.
Il y a donc trois hôtes par génération de tique.
Cycle diphasique: la mue de la larve en nymphe se déroule sur le premier
hôte. Il n'y a donc que deux hôtes et non trois par génération de tiques. Cas
observé chez certaines Hyalomma ou Rhipicephalus.
Cycle monophasique: toutes les mues ont lieu sur l'hôte. Cycle observé chez
tous les Boophilus et Margaropus, ainsi que 2 Dermacentor. Ceci
représente le stade ultime de l'évolution, avec un seul hôte par génération
de tique.
Il est très variable, et dépend des conditions
climatiques et du comportement des hôtes. Des arrêts des cycles sont possibles
: diapause des œufs (rare) ; diapause comportementale des larves, nymphes ou
adultes, en attente de conditions favorables. Diapause des stases à jeun jusque
1 an, en attente d'un hôte.
Dans le cas d'Ixodes ricinus et de Dermcantor reticulatus:
on peut avoir une à plusieurs générations par an lorsque le climat est favorable
et que les hôtes sont nombreux: 7 jours par repas, mue en 3-4 jours dans le
milieu, idem pour la ponte, soit 1 mois et demi pour une génération, dans le
meilleur des cas. En revanche, lorsque les conditions ne sont pas réunies :
il ne peut y avoir qu'un stade/an, soit un cycle complet et une génération en
3 ans.
Si l'on associe ce fait à la transmission verticale des agents pathogènes, démontrées
sur 3 à 4 générations de tiques pour Babesia canis. Les tiques présentent dans
une " zone à tiques " en feront une " aire à babésiose " durant au moins 12
ans ! ! ! Sans qu'un chien infecté n'ait besoin d'y venir. Les tiques entretiennent
la babésiose toutes seules, et elles n'ont pas besoin des carnivores pour survivre
puisqu'elles peuvent prendre leurs repas sur les petits mammifères présents.
3-1- Intervention sur l'animal durant les phases parasitaires
3-1-1- Mesures offensives = traitements acaricides
Les mesures offensives se résument en des traitements acaricides des animaux, régulièrement renouvelés, de façon à contrôler la population parasitaire. La plupart des familles d'acaricides/insecticides sont employées dans la lutte contre les tiques.
Organophosphorés: diazinon, coumaphos, fenitrothion+dichlorvos. Ces molécules
n'ont pas de rémanence et sont plus employées en traitement qu'en prévention.
La situation est identique avec les carbamates.
Carbamates: carbaryl
Organochlorés: seul le lindane est encore employé chez les carnivores
Formamidine: Amitraze (pas d'action insecticide). Rémanence variable
selon les formulations galéniques.
Pyréthrinoïdes: ils sont facilement utilisables car peu toxiques, chez le
chien. En revanche, la toxicité chez le chat est connue. Ils ont une rémanence
variable (quelques jours à plusieurs semaines) selon les formulations galéniques.
De nombreuses molécules sont commercialisées : perméthrine, deltaméthrine fluméthrine,
fenvalérate
Phénylpyrazolés: Fipronil. Sa très grande tolérance en fait une molécule
sûre chez le chien comme le chat. Sa forte lipophilie permet d'obtenir une rémanence
d'activité d'un mois environ et une grande résistance aux intempéries (résistance
à l'eau), ce qui est très intéressant pour les chiens se rendant en forêt à
l'occasion de promenades ou de la chasse.
Du fait de sensibilités différentes entre les tiques et les puces, une majorité des insecticides, notamment employés sous forme de colliers, sont inactifs vis-à-vis des tiques. Certains insecticides spécifiques sont inactifs sur les acariens, c'est le cas des nitrophénylguanidines comme l'imidaclopride. Les inhibiteurs de croissance des arthropodes à activité anti-hormonale ou anti-enzymatique actifs sur les insectes le sont peu sur les acariens comme les tiques. Des IGR spécifiques doivent être développées. Le fluazuron, inhibiteur de la chitine-synthétase, est très actif sur Boophilus microplus et son emploi est envisagé sur d'autres tiques. Il n'est commercialisé qu'en Australie.
Principales caractéristiques d'un bon acaricide anti-tique
Agir rapidement, avant que les agents pathogènes n'aient été transmis
par la tique. La mortalité doit être obtenue en 48 heures ou moins.
Agir longtemps
: la rémanence permet d'obtenir une protection continue dans les zones où les
infestations sont fréquentes
Agir sans
altération de la protection : Les carnivores vont dans des milieux humides,
chassent , se retrouvent sous la pluie. Un bon acaricide doit proposer une protection
continue quelle que soient les conditions.
Des animaux considérés comme protégés peuvent présenter des tiques. Il est nécessaire de savoir pourquoi, plusieurs raisons peuvent être avancées :
Temps de rémanence n'est pas dépassé.
Traitement adapté au poids du chien.
Mortalité non
instantanée. Il est donc possible de voir des tiques se déplacer sur un animal
correctement traité, avant qu'elles ne meurent.
Lorsque les aires à tiques sont connues, il est possible de limiter la présence des animaux dans ces zones. Il est ainsi possible de dresser des barrières entre les prairies et les lisières de forêt, ou d'éviter certaines prairies plus ombragées que d'autres.
Mesures médicales: vaccination
Il existe un vaccin contre une tique tropicale parasite spécifique des bovins, Boophilus microplus. Il est commercialisé en Australie et en Amérique du Sud. Il est basé sur des antigènes recombinants correspondant à des protéines de l'intestin moyen des tiques.
3-2- Interventions dans le milieu
Epandage d'acaricides: pose des problèmes de pollution environnementale,
mais aussi d'efficacité. Envisageable pour des tiques endophiles et domestiques
dont les aires sont connues (jardins, parcours, chenils).
Mesures agronomiques: débroussaillage pour détruire les "gîtes" des
tiques.
Mesures zoologiques: utilisation de vertébrés prédateurs de tiques, cas
de nombreux oiseaux, comme les poules, ou en zone tropicale des pique-bœufs
(Buphagus en Afrique, Merle des Molusques, Acridotheres tristis,
en Asie et dans le Pacifique).
Tableau : Rôle vecteur des Ixodidés:
Zone géographique
|
Agents pathogènes
transmis
|
EUROPE
|
|
Ixodes ricinus | Babesia divergens
(babésiose bovine) Borrelia burgdorferi (Maladie de Lyme), Coxiella burnetti (fièvre Q) |
Rhipicephalus sanguineus | Babesia canis (babésiose
canine) Ehrlichia canis (ehrilichiose canine) Hepatozoon canis (hépatozoonose) Ricketsia conori (fièvre boutonneuse méditerranéenne) |
Dermacentor reticulatus | Babesia canis (babésiose
canine) Babesia caballi (babésiose équine), Theileria equi (theilériose équine) |
AFRIQUE
|
|
Ixodes gibbosus | Paralysie à tiques |
Hyalomma dromedarii Hyalomma truncatum Hyalomma marginatum, H. anatolicum, H. detritum |
Paralysie à tiques Dysidrose Theileria annulata (theilériose bovine), T.equi, Babesia caballi, Anaplasma marginale, Fièvres hémorragiques virales |
Amblyomma variegatum | Theileria mutans (theilériose bégnigne), T.velifera, Cowdria ruminantium (cowdriose), Rickettsia conori, Coxiella burnetti, Dermatophilus congolensis, Arbovirus... |
Rhipicephalus appendiculatus R.bursa |
Theileria parva (theilériose
bovine) |
ASIE
|
|
H.dromedarii, H.marginatum, H.anatolicum |
cf. supra |
Haemaphysalis longicornis | Theileria orientalis, Babesia
gibsoni, B.ovata, encéphalites virales |
AUSTRALIE
|
|
Ixodes holocyclus | Paralysie à tiques |
AMERIQUE CENTRALE et
du SUD
|
|
Amblyomma americanum, Dermacentor andersoni, D.variabilis | Paralysie à tiques, encéphalites à tiques, fièvre pourprée des montagnes rocheuses (Rickettsia rickettsi) |
CEINTURE INTER-TROPICALE
(Amérique, Afrique, Asie, Australie, Pacifique) |
|
Boophilus microplus | Babesia bovis, Babesia bigemina, Anaplasma marginale |
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