Les phtirioses des carnivores.
Les phtirioses des carnivores, ou infestations par les poux, sont considérées
comme des entomoses rares en France métropolitaine, plus fréquentes dans
les Départements et Territoires d'Outre-Mer, comme en témoigne la pauvreté
des articles concernant cette parasitose.
Il semble pourtant que le nombre de cas soit en augmentation : nous en avons
observé régulièrement en consultation de dermatologie de l'ENVL, 5 cas observés
entre Octobre et Décembre 1995 sur des jeunes chats, et une dizaine de cas entre
1997 et 1999 sur des chats ou des chiens à l'ENVA. L'infestation est à l'origine
d'une dermatose prurigineuse d'évolution chronique, essentiellement
caractérisée par de la parakératose (squamosis important), une alopécie,
souvent diffuse et limitée, plus rarement des altérations de la peau
(hyperkératose).
Le diagnostic est aisé par observation des lentes, parfois des
adultes.
Le traitement
fait appel aux insecticides couramment employés chez les carnivores. Les sprays,
lotions et shampooings sont les présentations les plus efficaces.
Les poux du chien et du chat sont des insectes, de l'ordre des Phtiraptères,
du sous-ordre des Mallophages (famille des Trichodectidés) ou des Anoploures
(famille des Haematopinidés).
Deux types de poux sont observés sur les carnivores, des poux piqueurs,
à la tête plus étroite que le thorax (poux Anoploures) et des poux broyeurs,
à la tête plus large que le thorax (poux Mallophages) :
Pou broyeur du chat (Felicola subrostratus) (photos):
C'est un petit insecte
de 1 à 1,5 mm, pourvu de 3 paires de pattes, jaune clair, sans aile et aplati
ventro-dorsalement.
La tête est
" pointue ", triangulaire, à la base plus large que le thorax. Les antennes
sont visibles, à 3 articles.
Les pattes
se terminent par 1 griffe.
Les oeufs ou
lentes sont: ovalaires, operculés, blancs, mesurant 1 mm, et collés aux poils
par un cément (photos).
Pou broyeur du chien (Trichodectes canis) (photos):
Il est proche de celui du chat, c'est un petit insecte de 1 à 2 mm, jaune
avec 2 petites taches sur chaque segment abdominal, mais la tête est
rectangulaire, à base plus large que la hauteur.
Pou piqueur du chien (Linognathus setosus) (photo):
C'est un petit insecte,
sans aile, aplati dorso-ventralement, de 1 à 2 mm, jaunâtre.
La tête est
plus étroite que le thorax, le cou est absent, comme les cornes temporales.
Les pattes
ont une taille croissante de P1 à P3.
La phtiriose est une ectoparasitose due à la présence et la prolifération
d'un insecte phtiraptère dans le pelage du chat (photos).
Les adultes vivent
accrochés au pelage, souvent à la base des poils, plutôt en région dorsale
ou sur l'encolure, parfois jusque sur la tête et la face externe
des pavillons auriculaires.
Les poux sont des
parasites permanents.
Ils se nourrissent
soit par piqûre (Linognathus) et ingestion de sang, lymphe et exsudat
inflammatoire, soit en consommant des squames, des débris cutanés ou
de poils ainsi que l'exsudat inflammatoire (Felicola et Trichodectes). Ils restent
en surface de l'épiderme et peuvent se déplacer assez vite, d'où la difficulté
à voir les adultes. Ils s'accrochent à la base des poils avec leurs griffes.
Les femelles pondent
à la base des poils des oeufs ou lentes, blanchâtres, à coque ponctuée, faisant
1 mm de longueur. Les lentes sont fixées par un cément. Du fait de la pousse
du poil, elles se retrouvent sur toute sa longueur. Ces œufs éclosent en 6 jours
environ, libérant des larves qui ressemblent aux poux adultes (insectes paurométaboles),
qui à leur tour auront plusieurs mues (3 en général), avant de donner un adulte.
La durée du cycle
est de 18 à 21 jours. Chaque femelle pond environ 300 œufs et
vit 6 à 8 semaines.
Les poux ne résistent
pas dans l'environnement, 3-4 jours maximum à jeun. Ils craignent le froid
et la chaleur.
La contagion
sera donc avant tout par contact direct entre les animaux.
Les sources de parasites sont les animaux infestés.
Les phtiraptères résistent
très peu dans le milieu extérieur. Un environnement commun, niches, box,
peut permettre l'infestation, d'où la plus forte prévalence des phtirioses en
collectivités (chenils S.P.A., chenils d'élevage, chiens de S.D.F. vivant en
groupes), chiens ou chats errants.
L'infestation se fait par contact direct entre animaux sains et porteurs.
La contagion est possible par les couvertures et les litières hébergeant des
lentes.
Les larves de premier
âge sont très fragiles.
Du fait des modalités de contamination, par contage direct, le mode de vie
des chats est un facteur favorisant. Les chats " rodeurs " recontrant
de nombreux congénères, vont s'infester plus facilement que des chats "d'
intérieur ". Les collectivités, chatteries, garderies pour animaux, sont
des lieux propices à la transmission de ces parasites.
L'infestation des
chatons par leur mère est probablement fréquente.
Les mêmes remarques
peuvent être faites à propos des chiens.
Divers auteurs mentionnent
les poils longs comme facteur favorisant la phtiriose féline.
Ce critère est à relativiser, nous avons observé la plupart des cas de phtiriose
sur des chats "européens", et les robes étaient très variables.
L'infestation par les poux se traduit en général par une dermatose squameuse,
dépilante et diffuse, à prurit d'intensité variable. Des lésions de
grattage sont parfois observées sur l'encolure des animaux.
Une hyperkératose
parakératosique, caractérisée par la présence de squames blanchâtres de
petite taille, est notée. Les squames sont surtout abondantes en région dorsale.
Il n'est pas toujours
observé sur les chatons ou les chiots d'alopécie, tout au plus un pelage terne
et moins dense en région dorsale.
Lors d'évolution
chronique, depuis plusieurs mois, des lésions d'hyperkératose orthokératosique
(épaississement, mélanose, plissement de la peau en région dorsolombaire) sont
notés. Dans tous les cas, de nombreuses lentes sont visibles sur les poils.
Les adultes doivent être recherchés à la base des poils.
Le diagnostic est fondé sur une suspicion clinique confirmée par la
mise en évidence des poux adultes ou des lentes : Les poux mesurent environ
2 mm, sont jaunâtres, à la base des poils. Ils sont assez difficiles à voir.
En revanche, les œufs, ou lentes, mesurant 1 mm, blanchâtres et fixés aux poils,
sont facilement repérables (photos).
Un diagnostic différentiel
des autres dermatoses prurigineuses doit être effectué. Le prurit, le squamosis
(ici limité), la localisation dorsale, et l'atteinte de jeunes carnivores en
collectivité rapprochent cliniquement phtiriose et cheylétiellose.
L'association de
plusieurs agents étiologiques (puces et poux) est possible.
Les poux et lentes
sont mis en évidence par une observation attentive des poils,
puis prélèvement et observation entre lame et lamelle dans une goutte
de lactophénol (photos).
La petite taille (de
l'ordre du mm) fait que la confusion avec de simples squames est aisée. Les
lentes sont collées au poil, à la différence des pellicules (photos).
- Le traitement fait appel à l'application d'insecticides.
Il doit être répété du fait du faible pouvoir ovicide des substances
utilisées. Les poudres insecticides sont utilisables mais leur activité semble
moyenne, certains animaux présentant encore des poux après plusieurs traitements.
Les liquides en sprays ou lotions, ou les shampooings antiparasitaires,
permettant un meilleur contact entre l'insecticide et les ectoparasites sont
plus efficaces. Plusieurs principes actifs sont utilisables : fipronil, perméthrine
(excepté chez le chat), Dimpylate.
- Le protocole de traitement est basé sur le cycle évolutif de 21 jours
du parasite, soit:
Une application insecticide par semaine durant trois semaines,
avec les insecticides non rémanents,
Deux applications espacées de 3 semaines - 1 mois avec des spécialités
rémanentes.
- Notons que l'ivermectine, sans AMM chez les carnivores, n'est efficace que sur les poux piqueurs ou Anoploures, elle n'a pas d'activité sur les poux broyeurs ou Mallophages comme Felicola ou Trichodectes.
Les contacts entre carnivores sont le principal
mode de contamination. Il est utopique de vouloir les empêcher. Il n'existe
donc a priori aucun moyen de prophylaxie. La recrudescence de cas qui semble
s'observer est-elle due au hasard ou à des facteurs particuliers ?
On peut supposer l'augmentation
de la prévalence par le développement des chenils d'élevage, de chiens ou
de chats, mais il faudra également surveiller la possible émergence de poux
chimiorésistants aux insecticides. Cette résistance, décrite chez
les poux de ruminants du genre Bovicola (Damalinia) comme chez le pou
de l'Homme (Pediculus humanus), pourrait être favorisée chez les carnivores
par les traitements anti-puces ou anti-tiques qui agissent indirectement dessus.